Sale Liquido
de Mi
S.A.G.A, Buenos Aires, Aug 2023
Did a drop of sticky liquid just come out? I felt this strange sensation a few months back while I gazed upon Julia Padilla’s work for the first time. In her studio downtown Buenos Aires, she was working on her new series of sculptures that explore the connections between the insides and outsides of different bodies—be they human, plant, or machine like. I remember I was looking around this hunter-gatherer place filled with forgotten objects the artist assembled along her way: dried plant leaves looking like elf ears, surfaces covered in resin, antique pipes…Metamorphosis is key in Julia Padilla work. Through assemblage of fragments, she composes hybrid creatures at the crossroad of botany, animal, and artificial life. The artist invests how mundane materials can transform; inviting us to pay attention to our environments and the sensations flowing through our bodies.
Inside, outside. Inside, outside.
Entering the gallery, now transformed into a clean, almost medical space, I notice the contrast between this artificial setting and the works displayed on the white floor and walls. On the right, a sphere made of ceramics, glass fragments, fiberglass, and fabric that gives the sense of a toxic flower about to bloom. Nearby, a two-part piece resembling giant ears from a hybrid body. Other works made from aluminum, pipes, and dried leaves are scattered around the space. In each assemblage, the objects have an independent story before entering in symbiosis like they do. But perhaps what matters is what to feel or remember when seeing the works and what this sensation becomes. In “Sale Liquido de Mi”, the artist explores the idea of bodies that are both latent and active, like the work hanging next to the window. It is a sensual piece, making us expect liquid to come out, but will it ever? “Sale liquido de mi” embrace the concept of the orifices as channels that connects what's inside us with what's outside. Julia Padilla listens to her own sensations and intuition, exploring how to bring sensory experiences to life as they pass through these openings.
As the title “Sale liquido de mi” suggest, the exhibition imagine a liquid that moves, something that goes beyond what we can see. And so, the room becomes a vast sensory organ merging with the works we perceive.
Inside, outside. Inside, outside.
Pasta Water on Roses
DOC Expo, Paris,
Apr 2024
Dans l’atelier partagé de Ghyzlène Boukaïla, Julie Gaubert, Malik Mara, Mercedes Klausner, Paul Ralu, Thomas Moësl, Victor Villafagne et Wilfried Dsainbayonne, des voix s'entremêlent dans une polyphonie de sons. Des rires et conversations tissent et explorent des possibilités d'interconnexion et d’interdépendance. Ensemble, les 8 artistes réfléchissent au titre de leur exposition : Pasta Water on Roses.
Comment concilier l’envie de faire ensemble avec le désir de chacun.e de trouver sa place dans un milieu aussi compétitif que celui de l'art contemporain ? Au DOC, malgré les contraintes de temps, d'espace et de budget, les 8 artistes se sont rassemblés pour une exposition collective. Comment éviter la tragédie des biens communs, cette notion développée par l'économiste Garrett Hardin pour décrire une situation où la surexploitation des ressources communes par intérêt personnel conduit à la perte de l'entièreté du groupe ? Le titre Pasta Water on Roses fait écho à l'expression "boire l'eau des pâtes" et aux réalités économiques auxquelles les artistes et travailleures de l'art sont confronté.e.s au quotidien. Dans un monde façonné par le capitalisme effréné, la quête de mutualisation des ressources et d’une cohabitation pour une subsistance commune semble essentielle.
Dans l’ancien Couvent des Clarisses à Roubaix, où les artistes partagent leur atelier, le verbe "maisonner" prend tout son sens. Il décrit l'action de rechercher ou de créer un sentiment de confort, de sécurité ou de familiarité en relation avec un lieu. Ici, il s'agit non seulement de partager un espace physique, celui de l’atelier, ou de l’exposition, mais aussi de passer du temps ensemble, d'échanger, de créer en commun. Les ressources partagées par les artistes incluent l'espace physique de l'atelier et ses outils, mais aussi les compétences et expériences de chacun.e. Dans ce contexte, l'amitié devient un pilier essentiel. Des liens se tissent entre les artistes : boire un café, partager un repas, échanger des idées deviennent des rituels qui nourrissent des projets communs. Dans une perspective d'action collective et d'émancipation, c’est une quête d'équilibre fragile mais essentielle. Pasta Water on Roses nous invite à réévaluer nos interactions avec autrui et notre environnement pour envisager des possibilités de faire en commun.
L’attente
Sous marine
Une rose
Sous la guillotine
Bombe atomique
Corps suspendu
Dans le temps
Hydrocarbures aromatiques
Encens Rituel
Qui relie
Réapprendre
A cuisiner
L’eau des pâtes
Des adventices
Les manger
Les digérer
Ensemble
Et rêver d’étoiles.
Emotions Terranaissantes
Espace Croisé, Roubaix,
Oct 2023
Écouter, observer, sentir l’air circuler dans son corps à chaque inspiration et expiration. Percevoir la caresse de l’eau sur sa peau. Ressentir une quantité d’émotions contradictoires qui relèvent de notre attachement profond à nos environnements. Transcender les barrières qui séparent nos corps humains de ceux des autres êtres qui composent notre planète. Nous sommes inextricablement liés à toutes formes de vie. L'imagination prend le relais.
À travers un ensemble d’œuvres audiovisuelles et photographiques, l’artiste belge Elise Guillaume nous transporte des rives de la Mer du Nord jusqu'en Arctique, et trace les liens entre états psychologiques et états climatiques. Au centre de l’espace d’exposition, une série de photographies argentiques en noir et blanc est installée sur une longue table lumineuse. Méticuleusement développée par l'artiste avec un révélateur à base d'algues de l'Arctique, ces photographies révèlent des textures parfois viscérales immortalisant les métamorphoses de l'eau. Elles sont habilement disposées entre des algues flottant dans un liquide visqueux et leurs négatifs. Avec ce procédé à la fois artistique et écologique, Elise Guillaume cherche ralentir le processus photographique pour saisir la spontanéité de la matière. A mi-chemin entre l’atelier de l’artiste et le laboratoire, cette installation questionne le développement photographique traditionnel.
Au bout de cette table, le film Eventual Horizon, tourné en Arctique, est le reflet de l'expérience personnelle de l'artiste marquée par l'insomnie, le deuil et l'espoir. Il nous plonge dans un paysage en constante transformation, où corps et paysages s'entremêlent. Dans un second espace plus intime, Where I Learn to Breathe prolonge ce moment de (re)connexion avec nos sens. À travers une lettre intime adressée à un être cher, l'artiste nous emmène vers la guérison, cherchant la symbiose avec la nature. Les paysages sonores des films sont composés d'enregistrements réalisés sur le terrain. Certains effectués avec des hydrophones permettent une écoute profonde de sons qui échappent à la perception humaine. Ce travail ouvre la porte à l'invisible afin d'explorer de nouvelles approches pour appréhender nos écosystèmes et la crise écologique.
Le titre de l'exposition, emprunté au concept du philosophe Glenn Albrecht, fusionne les mots "terre" et "renaissant" pour évoquer les émotions que nous éprouvons en réaction aux changements environnementaux. Comment ces expériences influencent-elles notre manière d'interagir avec le monde qui nous entoure ? Dans le murmure des sons de glace, d’eau et des vibrations de la terre, Émotions Terranaissantes met en évidence la capacité transformatrice de ces états, encourageant ainsi une relation renouvelée avec le vivant.
Sources
de liens
Espace Croisé, Roubaix,
Dec 2023
De la collaboration vibrante Les cents plaids du duo ORAN avec les habitants.es du quartier de l’Épeule, à l’exploration sonore de Victor Villafagne et Thomas Moesl dans la chapelle, chaque recoin du monastère devient territoire d’expérimentation artistique. Sous une alcôve, à la recherche des sources du lien, la pièce sonore et poétique de Paul Ralu nous fait penser l’écoute comme un outil d’exploration de notre rapport aux territoires. A côté, l’œuvre Mutations d’Elodie Derache s’épanouit au plafond du cloître, tissant une narration sensorielle à travers des entrelacs de viscères moelleux.
A l’étage, le travail de Wilfried Dsainbayonne, Léo Sudre et Julie Gaubert se découvre, là où les bouées et les gilets de sauvetage ne flottent plus. Coulés en béton, en fonte, ils deviennent des artefacts évoquant les traversées migratoires et les naufrages. Sous la lumière chaude du couloir, une centaine de briquets en cire d’abeille alignés au sol sont éclairés. Cette pièce sensible de Julie Gaubert rend hommage aux victimes de violences policières en France. Ces objets modélisés, coulés, sont à la fois fragiles, susceptibles de s’effriter, de fondre et disparaître mais aussi imposants par leur présence ou leur accumulation. Ils portent des récits longtemps tus, exposant leur vulnérabilité.
D’autres narrations (in)tangibles prennent forme à travers le travail de Roberto Calopietro et Lucie Marchand, par le biais de la matière, du corps et de la musique. Dans l’ancien gymnase, un paysage post-apocalyptique se déploie. Le lustre familial de Wilfried Desbayonne est transformé par l’artiste en un objet – un corps de tentacules émergeant littéralement du mur. Les lueurs rougeoyantes des calebasses de cet être se reflètent sur le sol vert légèrement brillant du gymnase. Tout comme les teintes rouge et bleue du film #31# (Unknown calling) de Ghyzlène Boukaila. Ce court métrage, tourné à Oran en Algérie, raconte l’histoire d’un individu dévoilant son identité à travers une performance de musique RAÏ. Derrière un rideau suspendu, un paysage de ruines esquissé par Mercedes Klausner surgit des cendres de territoires incendiés en Argentine et en France. Entre ces vestiges, les coraux aux teintes du gymnase délabré de Malik Mara prennent vie, s’intégrant dans ce tableau étrange de décombres et de récits intimes.